Une histoire de famille
« Quand tu nais le 15 août, ici, tu tombes dedans. » Pousser ses premiers cris un jour de fête des vins, quand on naît dans une famille de vignerons, aussi bien du côté du père, Patrice, que de la mère, Lydie, ça a en effet tout du présage. Pourtant, Azeline Delarue se destinait à suivre une autre voie, loin du rythme effréné des vendanges et du travail de la vigne.
Sa vocation, elle pensait l’avoir trouvé en travaillant dans un laboratoire de pharmaceutique et de cosmétologie. Pourtant, elle plaque tout en 2013 « j’avais l’envie de retrouver un peu d’humain, de mettre les mains dans la terre (…) Inconsciemment, c’était ma destinée »
Après un BTS Commercialisation des Vins à Montreuil-Bellay, elle rejoint son père sur l’exploitation familiale. Devenant ainsi la quatrième génération à reprendre le flambeau au Domaine de la Perrée. Jusqu’alors transmis de père en fils, le domaine se transmet désormais de père en fille(s).
Quelques décennies plus tôt, c’est Patrice qui avait lui aussi décidé de marcher dans les pas de son père. Mais il avait fallu attendre que le timing soit le bon : « J’avais une grande différence d’âge avec mon père, qui partait à la retraite à ce moment là… Sans quoi ça n’aurait pas été viable, qu’on travaille tous les deux ensemble. »
Il commence avec 1 hectare 82 de vignes en 1985. Peu à peu, entre les achats de parcelles à la famille, oncles et tantes, et les acquisitions faites auprès des parents de Lydie, le domaine prend de l’ampleur. « Tous les ans, on s’est agrandi un petit peu (…) La plupart des vignes, c’est nous qui les avons plantées. » Aujourd’hui, le domaine s’étend sur 17 hectares, les deux-tiers sur Saint Nicolas de Bourgueil, le tiers restant sur Bourgueil, essentiellement en vin rouge, un peu en rosé.
Une transmission père / fille
Il n’est pas toujours simple de travailler en famille… Mais les Delarue semblent avoir trouvé leur équilibre. « Moi, j’aime bien prendre des risques… Papa est là, avec l’ancienneté… » Il ajoute : « le recul. » L’expérience de l’un calme la fougue de l’autre, mais les deux s’accordent sur le fait qu’il faut constamment évoluer. « D’une année sur l’autre, même si la base reste la même, en fonction des millésimes on fait tout le temps de nouvelles choses, on se remet en question… »
D’ailleurs, les idées ne manquent pas. Même chez les deux sœurs cadettes d’Azeline, qui en parallèle de leurs études, s’impliquent déjà dans la vie du domaine. Léa s’intéresse à l’événementiel, et apporte sa touche aux manifestations proposées au Domaine, tandis que Cloène voudrait mettre à profit sa maîtrise de l’anglais et internationaliser le Domaine de la Perrée. Une affaire de famille, en somme.
Le seul point de désaccord entre père et fille, c’est du côté des épisodes marquants de l’histoire du Domaine qu’il faut le chercher. Azeline pense tout de suite au gel de 2016 « Ah non ! 1991 ! » reprend aussitôt Patrice. Il faut dire qu’en avril 1991, Azeline n’avait pas un an. Mais dans la tête de ses parents, le souvenir est toujours vivace. « Je me souviens de la date exacte… 21 avril. La veille, on signait la donation partage de mes parents chez le notaire. La météo annonçait -3°C. Le lendemain matin, les vignes étaient gelées. » Acharnement de la météo, la seule parcelle préservée du gel, au Vau Jaumier qui domine l’appellation saint-nicolas-de-bourgueil, a pris la grêle quelques semaines plus tard. Mais Patrice a su rebondir. Quelques années plus tard, il décroche un trophée des jeunes vignerons du département… Et surtout, deux étoiles au Guide des Vins Hachette de 1998.
Faire découvrir son terroir
Parti de 4 hectares en 1920 et des cultures en maraîchages, le Domaine de la Perrée a considérablement évolué depuis. Père et fille ont à cœur de continuer sur cette lancée. Preuve en est ce label HVE (haute valeur environnementale), décroché en 2019. Le but ? Tendre petit à petit vers le bio, « se remettre en question sur les techniques ». Depuis cette année, c’est toute une parcelle qui bénéficie de cette conversion. Patrice, Lydie et Azeline invitent les curieux locaux ou de passage à découvrir à leurs côtés cette parcelle en particulier : à travers les vignerons presque parfaits, amateurs et néophytes peuvent se glisser dans la peau d’un vigneron le temps d’une journée taille, une journée vendanges, une journée ébourgeonnage.
Faire découvrir leur métier, encourager pourquoi pas de nouvelles vocations « on n’apprend pas à faire du vin dans un livre, mais sur le terrain » comme le souligne Azeline.
Le contact humain qui lui faisait défaut dans une autre vie, elle cherche à le développer davantage aujourd’hui. Le Domaine s’est lancé dans des box découvertes, pour présenter ses vins, mais aussi faire découvrir la Touraine et son terroir autrement : via ses sites touristiques incontournables, bien sûr, mais aussi par sa gastronomie. « Le vin est un produit de partage » comme le rappelle Azeline.
INFOS PRATIQUES / DOMAINE DE LA PERRÉE
La Perrée – 37140 Saint Nicolas de Bourgueil
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